7 juil. 2011

REPRISE

Je n’ai pas eu l’honneur de faire usage de mon précieux droit de vote lors du plébiscite national qui a récemment fini d’officialiser les pratiques néo-médiévales du cagibi national. J’étais à Paris, la capitale mondiale de la mode, de la gastronomie, des touristes, des blondes à vélo, de l’art, du shopping frénétique, bref, la capitale des gens biens qui pensent mieux et donc l’épicentre de la démocratie moderne. Ceci est un postulat non critiquable, car rappelons ici que Paris est l’origine du monde, le royaume de Sir Dominique Perv, dont la bite royale décide des unes de magazines et fascine les éditorialistes.
Paris est la capitale mondiale de la bite.


A Paris, les gens mangent des bananes en marchant. Ceux qui ne peuvent pas mâcher ingurgitent des smoothies fraise-banane de la marque Innocent. Ce n’est pas très bon, mais à Paris les gens aiment les smoothies Innocent. Je me demande si les singes aiment les smoothies. Les femmes portent des lunettes de soleil blanches, les enfants ont des Iphone 4 blancs et il est interdit de ne pas consommer. Les boutiques banales sont blanches, les boutiques de luxe sont noires. Le noir est la couleur du luxe, la couleur de Paris, la couleur de la merde des singes.
A Paris, place Beauveau, il y a le Bristol, et tout autour du palace, s’enchainent les bistrots chics et pubs américains où l’on sert des cheeseburgers à vingt euros. Place Beauveau, Matignon, l’Elysée. L’anus de la démocratie mondiale. Pourtant, ici à Paris, les gens biens exècrent ce que l’histoire de France leur a offert. Ils haïssaient le franc, adulent l’euro, et rêvent en dollar et en couleur, ils vivent le rêve américain par ingurgitation de viande hachée et de frites surgelées. A Paris, la gueule béante, la mondialisation consumériste aspire les passants dans un trou noir et les recrache aléatoirement dans une maroquinerie de luxe, une chaine de fast-food bio, un sex shop gay à Pigalle, un nike store dans le 8ème, et ainsi de suite, jusqu’à la fin du temps moderne, soit le dernier métro.

Quand on décide de franchir le pas démocratique, de vivre dans ce modèle, ce business model, il faut faire, non pas des concessions, mais des sacrifices, abandonner tout espoir d’un retour à une vie normale, la dolce vita pré-années 80, l’ancien monde sans sida, sans stock options, sans carte bleue, sans sms, un monde gentil et innocent. Avant les horodateurs, il fallait payer pour rouler (essence). Maintenant, on paye même pour s’arrêter. On paye pour tout et rien, les poches sont percées et l’argent coule à flot et se déverse dans les égouts de l’oubli d’un monde qui a changé.

En 2011, donner sa voix ne vaut finalement rien. La machine alimente le système, le système soumet l’homme, l’homme consomme jusqu’à sa perte, car il faut bien donner pour recevoir. Le seul espoir serait alors de naitre femme dans une caste supérieure de ce monde nouveau, une femme dont le seul destin serait celui d’avaler des bites en échange de vêtements et de ballades en décapotable. La femme est l’avenir de l’homme, c’est inscrit en grand à l’entrée de Vuitton St Honoré.

Paris est la capitale d’un monde liberticide défendu par une armée dévouée de serveurs et de vendeuses, où finalement, la seule chose de gratuite, et peut être pas encore pour longtemps, c’est respirer. Mais il ne faut pas s’en faire, les hommes sont dressés et prêts à payer, même pour inspirer puis expirer. Jusqu’à la mort.


Paris n’est pas un échantillon.
Paris est un laboratoire.
Et nous sommes des singes.

La démocratie, c’est la fin du monde.