31 mars 2006

Une certaine forme de liberté


Je m’appelle Loki Gunnulf. Je suis issu d’une prestigieuse lignée de guerriers nordistes, communément appelés les Vikings. Je partage fièrement mon prénom avec l’un de nos dieux, le frère de Thor, fils d’Odin. Mon nom de famille lui, signifie simplement et purement « le loup de la bataille, le guerrier ».

Je suis craint de mes semblables pour ma cruauté sans bornes. Selon vos critères de la vie, j’ai vécu une enfance atroce : ma mère étant morte à l’issue d’une banale rixe familiale (rouée de coups, violée puis tuée par mon oncle Fiodor), j’ai été élevé par les hommes, au départ tous de vulgaires inconnus, qui se sont révélés être de véritables bêtes, assimilables à des loups blancs, les plus cruels de tous. J’ai donc grandi et partagé ma courte vie au sein de leur meute infernale. A présent, cette meute est constituée d'amis et de frères de sang. Cette meute est ma seule famille.

Première bière à l’âge de cinq ans. Premiers rapports sexuels à neuf. Premier meurtre de sang froid à onze ans. Premier sabordage de navire marchand, suivi de pillage, tuerie sanglante, préparation d’un feu pour couler le navire, etc. : treize ans et demi. A seize ans, mon butin ridiculisait déjà celui de plusieurs anciens.

Selon mes critères et sur la base des valeurs que m’a inculquée ma vie, j’affirme la chose suivante : je peux tuer n’importe qui, n’importe quand, n’importe où, sans raison valable. Sur cette terre comme sur la mer, seule ma volonté compte.

Je suis un homme libre. Un homme pour qui le temps ne vaut rien. Un homme pour qui seul l’instant présent compte.

Ma passion dans la vie ? Mon travail. Parce que si vous pensez qu’on devient membre de l’élite mondiale du pillage et du crime barbare en prenant les choses par-dessus la jambe, vous vous trompez lourdement. Etre viking, c’est un métier, un savoir-faire. Un art de vivre.

Je suis un véritable guerrier, un combattant, le Berserk dans toute sa splendeur. J’exécute mes proies machinalement, sans me poser de questions, avec précision et délectation. La philosophie viking, c’est un peu comme la philosophie sexuelle moderne finalement: quand on commence à réfléchir, on tue le sexe. Pareil pour mon boulot. Exécuter les hommes, violer leurs femmes et noyer leurs enfants sont des tâches qui peuvent sembler bien cruelles, voire inhumaines, je vous l’accorde, mais avez-vous une idée des atrocités qui ont ou vont être commises au nom de l’épanouissement professionnel ? Je me réfère bien entendu aux marchands phéniciens, cette race inférieure qui pollue nos mers et nos terres dans son seul souci d’expansion économique.

Le must dans mon métier, c’est évidemment les déplacements professionnels. Le drakkar étant un moyen de locomotion tout à fait appréciable, j’ai pu ainsi visiter la plupart des pays des mers du nord. Pour votre information, sachez que le terme drakkar n’est pas le terme approprié, car il signifie « dragon ». Pourtant, aucun de nos navires ne présente de figure de dragon en proue. Pour moi, ce n’est qu’un moyen de transport pour assouvir mes désirs de violence.

Je suis un homme libre.

Mes propos peuvent paraître froids, mais mettez vous à ma place aussi. Le viking de base s’ennuie ferme, chez lui dans sa chaumière, bien au chaud, au repos. Sa femme est trop usée pour le satisfaire. Marre de la bière locale, servie trop tiède. Dehors il fait froid. Les lacs sont gelés. Alors il attend patiemment l’appel au combat, synonyme d’orgies sexuelles avec d’exotiques prises de guerres féminines. Son excitation n’est jamais calmée. Envie de mer.

Il peut partir à n’importe quel moment. Il veut partir retrouver sa liberté naturelle.

D’ailleurs, j’entends le cor résonner dans la vallée. Il est l’heure pour moi de partir rejoindre mes amis, mes frère.

L'heure de retrouver ma liberté.